Thème : Microfluidique

Correspondant(s) : Michael Baudoin, Vincent Senez

La microfluidique est la science de la manipulation des fluides à l’échelle micrométrique. Elle étudie le comportement de fluides simples ou complexes, mono ou multiphasiques, dans des canaux micrométriques. Développée depuis la fin des années 90, ce domaine émergeant offre de nouveau champs d’étude aux physiciens, chimistes et biologiste avec des applications novatrices comme des dispositifs d’analyse miniatures à haute sensibilité, des microréacteurs chimiques ou des systèmes de manipulation de cellules… Elle implique aujourd’hui une dizaine de milliers de chercheurs et d’ingénieurs dans le monde. On compte deux cents startups créées dans le domaine, et environ six cents utilisateurs industriels. La Technology Review du MIT cite régulièrement cette technologie comme susceptible de ‘changer le monde’. Ses champs d'application sont extrêmement variés, des têtes d’imprimante aux systèmes d’analyse rapide d’ADN en passant par les systèmes d’affichage.

Sur les laboratoires sur puce, on installe des ‘fonctions’, on assemble des ‘briques’, dans un mouvement orienté vers une complexification croissante. Les exemples de laboratoire sur puce sont maintenant très nombreux, et si un inventaire devait être fait, il comprendrait des centaines de milliers de lignes. À titre d’exemple, on peut citer des puces microfluidiques traitant un échantillon, le mélangeant avec un soluté, drainant l’ensemble dans un canal électrophorétique, pour fournir in fine une information sur la nature des ADN contenus dans l’échantillon. D’autres exemples de puces sont des systèmes synthétisant des molécules impossibles à obtenir par des technologies conventionnelles, ou cristallisant des protéines beaucoup plus rapidement que les techniques classiques, ou encore mimant le micro-environnement d’un organisme vivant pour étudier le processus métastatique, etc. Dans tous les cas, la miniaturisation, au-delà de la réduction de la taille de l’échantillon, accélère l’analyse, automatise le processus, sans aucune dégradation des performances. La physique sous-jacente, rendant possible de telles performances, est celle de la laminarisation des écoulements, de la prévalence de la capillarité, de la rapidité extrême des échanges, thermiques et massiques, et de l’exacerbation des effets électrocinétiques. Aujourd’hui, dans de nombreux laboratoires de physique, chimie et biologie, la microfluidique est utilisée. Les journaux scientifiques regorgent de contributions scientifiques obtenues grâce à elle.

Les innovations microfluidiques sont nombreuses et variées. L’analogie avec la microélectronique a encouragé les chercheurs à produire des vannes massivement intégrables, dans le but de réaliser des ‘microprocesseurs’ microfluidiques. La société Fluidigm propose aujourd’hui des systèmes élaborés en PDMS, incluant un millier de micro-vannes intégrées sur une même puce. Ces systèmes permettent d’effectuer l’analyse du génome et du transcriptome sur cellule unique, avec une capacité d’une cinquantaine de gènes, sur des centaines de cellules. Le coût de cette machine reste substantiel (environ 200 k€), et c’est peut-être une des raisons pour lesquelles ces systèmes ne se sont pas encore diffusés massivement dans les équipes de biologie. Il reste que leurs performances démontrent la puissance de la microfluidique dans ses applications au vivant. On aimerait encore et encore réduire le coût et la complexité d’utilisation de ces systèmes. Il y a là des verrous technologiques intéressants à lever.